La Bretagne est une terre de légendes et de belles histoires. Dans le centre équestre de ses parents où il a grandi, un poney-club entouré par les menhirs de Carnac (Morbihan), Auxence Kerzerho le sait depuis toujours. Dès sa naissance, Auxence est touché par une hémiparésie. Pour améliorer sa motricité, ses parents, gérants de ce centre équestre depuis plus de trente ans, le mettent tout de suite à cheval pour l’aider à travailler sur le déséquilibre entre son côté droit et son côté gauche. Un déclic pour leur enfant. « Le cheval est devenu ma passion, poursuit Auxence. J’ai commencé sur le circuit CSO à poneys, en participant notamment aux championnats de France à Lamotte, de 2012 à 2017. Mais sur la fin, je stagnais. Mon côté droit commençait à atteindre ses limites. J’avais des difficultés pour accompagner le cheval comme il faut. Mon père est cavalier de dressage, alors je me suis dit pourquoi pas essayer. Pourtant, pendant de nombreuses années, je ne voulais pas entendre parler du dressage. Je ne voyais pas l’intérêt de cette discipline comparé au saut où il y avait toute cette adrénaline. Heureusement, j’ai eu une monitrice qui m’a montré tout ce que l’on pouvait faire sur le plat. J’ai décidé d’approfondir pour développer de nouvelles compétences et découvrir un nouveau domaine. Mon poney avait débuté en complet et avait quelques bases. Sur ma première reprise, j’ai tout de suite accroché et j’ai adoré. » L’histoire est en route. 

Pendant deux ans, Auxence évolue sur le circuit valide à poney. Un jour de concours, à la remise des protocoles, un juge vient le voir. Il a noté quelques manques de précision sur le côté droit et soupçonne un handicap. Auxence lui raconte son histoire. Le juge lui parle alors du circuit de para-dressage. « Au début c’était compliqué d’en entendre parler, raconte le jeune Breton. Depuis mon enfance, j’étais sur le circuit valide et je ne m’étais jamais trop posé la question du handicap. J’ai eu du mal à l’accepter pendant mon adolescence. Avec la prise de maturité, j’ai pris conscience de tout ça et j’ai réussi à m’ouvrir à cette discipline. Ce fut un de mes meilleurs choix sportifs. Mais au-delà, de ma vie « tout court ». Cela m’a permis de me remettre en question. Le para-dressage m’a ouvert les yeux. Le dépassement de soi est un vrai moteur avec l’envie de tout donner sur le rectangle. La possibilité de faire du haut niveau est aussi très motivante. Cela permet de se projeter et de tout donner sur ce circuit. »

Avec Fiderglanz, son cheval, il participe à ses premiers championnats de France en 2022, en Grade IV, et remporte le titre Amateur. Ce résultat lui ouvre les portes des stages fédéraux et de ses premières épreuves internationales. En 2023, il participe ainsi aux CPEDI 2* à Deauville et à Waregem (Belgique). Une rencontre lui fait franchir une nouvelle étape. Les gérants de Fleur de Lavande, organisme spécialisé dans les séjours adaptés pour les personnes en situation de handicap mental ou/et physique, lui confient Eros Baraire, étalon Selle Français né en 2014. Lors d’un stage fédéral, Eros séduit le staff fédéral qui conseille alors au cavalier de se concentrer sur le para-dressage avec lui. Dans le même temps, Auxence poursuit avec Fiderglanz sur le circuit valide. Ce fonctionnement lui permet de continuer à prendre de l’expérience sur le circuit valide et de retransmettre tous les acquis en para-dressage, avec Eros. 

LES JEUX PARALYMPIQUES, UNE SOURCE D'INSPIRATION

L’été dernier, Auxence était dans les tribunes installées dans le parc du château de Versailles, à l’occasion des épreuves des Jeux paralympiques. « J’y suis allé pour soutenir l’équipe de France. Les voir dérouler leur reprise dans un tel endroit, donner le meilleur d’eux-mêmes, c’était incroyable à voir et à vivre. Un moment magique. Ça donne énormément envie d’être un jour à cette place. Mais nous sommes encore un binôme assez vert. Il faut continuer à nous former. Je vais régulièrement chez mon entraîneur Guillaume Recoing, près de Nantes, pour travailler notre cohésion. »

Initialement lancé dans des études dans le commerce et le digital, Auxence a choisi de se consacrer pleinement au monde du cheval. Diplôme d’animateur équestre acquis, il peut désormais entraîner jusqu’au Galop 4. « Je donne un coup de main à mes parents pour donner des cours aux enfants. J’adore ça. Je vais continuer à développer mes compétences notamment sur l’appréciation des allures des chevaux ou sur toute la complexité des différents exercices, les exigences à pied ou à cheval. » Avec désormais le regard tourné vers le futur. « Il ne faut pas brûler les étapes, tempère Auxence. Il faut d’abord continuer à travailler pour que mon binôme avec Eros soit bien rodé. Nous voulons profiter des stages fédéraux et des masterclass pour développer nos compétences et acquérir des automatismes pour que cela devienne fluide. Ensuite, en fonction de nos progrès, nous verrons où cela nous mène et ce que le staff envisage pour nous. D’autant plus qu’en Grade IV, il y a de la concurrence. Quand je vois le niveau de Vladimir (Vinchon) et d’Alexia (Pittier), j’ai bien conscience qu’il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Mais c’est tellement motivant de les voir. C’est un vrai booster pour tout donner et essayer d’arriver un jour à leur niveau. »